Galerie Lelia Mordoch

 

 Gérard Delafosse
"Table Rase"


Gérard Delafosse travaille le verre depuis le début des
années 1980, joue de ses transparences, de sa fragilité, de la
mémoire et de l'oubli. Il brise, coupe, colle, ajoute vernis,
papiers, traces de peinture. Dans une gestuelle toujours plus
épurée, il travaille l'oubli pour arriver à l'essentiel. Comme il le
dit si bien : " La partie visible de ma peinture n'est que le
résultat de la soustraction... découlant d'une somme
d'éléments volontairement non utilisés retranchée d'éléments
non visibles. ", c'est ainsi que l'opacité de la toile a cédé la
place à la transparence du verre. Les pièces récentes vont
toujours plus loin dans le sens de l'épure, circulaires,
aériennes, porteuses d'empreintes légères, elles sont portes
ouvertes sur un monde à inventer.

Né en 1952 en France, vit et travaille en France, 1ère exposition
Galerie Lélia Mordoch en 1994. Expositions personnelles :
"Escalade" 1998, "Oubli Stratégique", 1996


Traversée
14.08.01
129,5 cm x 96,5 cm
Acrylique / Verre / Papier / Vernis / Bois

Table rase :

C'est la fragilité du verre qui donne sa dimension à l'uvre de
Gérard Delafosse, elle constitue un contraste parfait avec la
force, de ses traits, de ses points, de ses traces aux couleurs
fondamentales.

Le verre est tabou : il coupe, tranche, se brise. Comment
aborder une uvre d'art en verre, comment la saisir pour
l'accrocher sans trembler puisqu'elle est, par définition fragile
comme du verre ? Curieusement, les uvres sous verre,
estampe, dessins, gravures ne font pas aussi peur si le verre
se casse, l'uvre qu'il protège restera censément intacte . Une
uvre en verre, si elle se brise sera détruite à jamais. Ni
l'architecture moderne, ni le mobilier contemporain n'ont
reculé devant l'usage du verre alors que dans un salon d'art
contemporain , montrer des uvres sur verre demeure une
gageure. Quoi ? Des oeuvres en verre mais c'est fragile !

Pourtant il est des verres antiques aux pâtes translucides et
opaques, depuis longtemps émoussées par le temps aussi
émouvantes que les vitraux des cathédrales.

Il faut oser le verre les toiles peuvent brûler, se ternir, se
déchirer, les papiers s'étioler et des vases antiques
traverser les siècles.


Grands ouverts
122 cm x 222 cm
Acrylique / Papier / Verre / Vernis / Bois
26.08.01

 

Pourquoi Gérard Delafosse a-t-il choisi le verre comme support?

La fragilité fait partie intégrante du travail de Gérard Delafosse.
Il en joue comme d'un paradoxe, verre sur verre collés et joints
comme deux mondes qui se superposent. L'éclat du verre
brisé, dompté, apprivoisé, remplace pour lui la nudité de la toile.
Il plonge dans le néant dans un travail de déstructuration et de
restructuration propre à l'abstraction ; le verre lui offre la
perfection de sa transparence, la noblesse de ses jeux de
reflets et de miroirs, vitrine de son regard, il lui donne la faculté
de construire sur le vide. Peindre le vide, c'est marcher sur une
corde raide où l'éternelle question du "pourquoi y-a-t-il quelque
chose plutôt que rien ? "se repose à chaque trace d'encre.
Gérard Delafosse sonde le vide, funambule du filigrane, il
gomme jusqu'à l'essentiel. pour retrouver un équilibre dans la
force d'une calligraphie qui atteint à la perfection. Il suggère un
espace onirique dont les échos s'imposent à l'il du
spectateur tout en lui laissant la liberté de se perdre dans les
méandres des superpositions de traces, de collages, de
papiers, d'encres, qui ne font que jouer des transparences déjà
suggérées par leur support premier : le verre. Une empreinte
digitale noire, un point jaune, les contours bleus inachevés d'un
cercle et c'est tout un univers fait de force et de poésie qui se
dévide sous nos yeux.


Centre Bleu
Ø 80 cm
Acrylique / Verre / Vernis / Acier
13.03.00

Le travail de Gérard Delafosse ne renvoie qu'à lui. Oubli,
mémoire, persistance des thèmes et des couleurs, des
supports, Gérard Delafosse est fidèle à lui-même dans une
vision globale qui trouve sa source dans l'univers du quotidien,
du chemin, de la maison, de la trace qui s'efface

Les portes ne s'ouvrent sur rien, les échelles se perdent
comme les escaliers dans un devenir incertain où subsistent
ses couleurs fétiches. Il évite le centre dans le déplacement de
ses objets toujours simples qui semble flotter dans l'espace,
émerger du néant dans un jeu de miroir. Peu à peu, il dessine
son histoire face au monde, défini sa place, toujours ailleurs
dans un univers en devenir. Comme les titres de ses
expositions et de ses livres : Repère/Oubli stratégique/
Eléments de précision/ Escalade/ Table rase, ses uvres se
répondent, forment un tout dont la continuité se dévoile comme
les collines d'extrême orient apparaissent dans la brume de
l'aube sur les estampes chinoises.

Lélia Mordoch (octobre 2001)

Site personnel de Gérard Delafosse