[ Galerie nationale du Jeu de Paume]

 


 

Jaume PLENSA

"La Neige Rouge", 1991 - Métal et néon, 11 éléments, 215x355,355 cm
Photo: S. Crowe © ADAGP, Paris 1997.

 

    Cette exposition est un parcours proposé à travers l'oeuvre récente de l'un des plus brillants artistes espagnols contemporains. Des sculpteurs de sa génération, Jaume Plensa (né en 1955 à Barcelone) est de ceux qui se sont très tôt imposés sur la scène internationale, tant son aptitude a introduire un esprit poétique dans la sculpture a surpris. Présentée initialement à la Fondation Joan Miro de Barcelone, I'exposition - après Paris - sera accueillie par la Kunsthalle de Malmo et à la Kunsthalle de Mannheim.

    Des grandes pièces de fer battu, travail sur la "mémoire tellurique", aux travaux sur les résines qui privilégient la transparence, I'oeuvre de Jaume Plensa est une rêverie sur la matière, une forme de méditation bachelardienne. L'exposition présentée au Jeu de Paume trace, en vingt-six sculptures réalisées entre 1991 et 1996, les dernières directions de son travail.

    Les pièces récentes de Jaume Plensa, si elles se démarquent très fortement des imposantes sculptures antérieures réalisées en fonte de fer, participent toujours de cette même volonté de créer une sculpture où la pensée serait à l'oeuvre. En effet, malgré la nouveauté plastique, malgré aussi celle des effets et des matériaux utilisés - la résine, la lumière, le mot- les oeuvres nouvelles proposent un territoire de réflexion dans lequel la forme pure est souvent placée en retrait par rapport à la capacité d'évocation de l'objet proposé. A présent, I'artiste semble s'attacher moins à la matière qu'à la sensation et l'émotion qu'elle véhicule.

 

"Cloudy Box XVII", 1994 - Résine polyester 104x60x80 cm
© ADAGP, Paris 1997

 

    Ainsi, bien que l'écriture ait toujours été présente dans son oeuvre, elle joue ici avec la transparence et avec la légèreté de la résine dans laquelle les mots s'inscrivent et, plus qu'à la signification et à la lisibilité du texte reproduit, Plensa s'intéresse au mot en soi. Le texte, réduit au fragment, se libère ainsi du poids monolithique qu'il affirmait lorsqu'il était, dans des pièces antérieures, apposé à la surface du métal. Et si l'artiste a toujours recours aux écrits de Baudelaire , Shakespeare, Dante ou William Blake, les textes se fondent désormais dans le corps de l'oeuvre. L'écriture est assimilée au geste du sculpteur qui inscrit le texte directement dans la matière. La Riva di Acheronte (1995), par exemple, surimprime visuellement sur la surface translucide de la résine, un texte dont le début et la fin sont inextricablement liés, le vide physique central de l'oeuvre étant occupé virtuellement par les mots. Il place le spectateur dans l'ambiguïté: où commence, où finit " I'impossible " lecture ?

     

"RêveII", 1991 - Métal moulé et lumière, 200x200x200 cm
© ADAGP, Paris 1997

     

     Le mot chez Plensa a un pouvoir particulier: celui, entre autres, d'introduire, par sa force suggestive, à l'univers intelligible et perceptible d'une inscription. Qu'il s'agisse d'un mot aussi familier que Rêve (1991), Cave (1995), Home (1995), d'un nom d'artiste inscrit sur une plaque de résine (David-48, Duchamp-66, Giotto-4) ou sur la surface d'un caisson lumineux (Islands 2, 1996), il agit comme la clef d'un " territoire sensible ". Plensa engage ainsi la possibilité d'une circulation, d'une dérive poétique entre le mot ou le nom cités, lui- même et le spectateur, mais il esquisse aussi la possibilité d'un passage entre une intériorité et une extériorité. La sculpture fonctionne donc pour lui, non seulement comme texte mais également comme un contenant. Elle n'est plus un objet clos sur lui-même, mais devient un réceptacle au contenu non-défini, une force, une énergie qui met en communication.

     

"Bedroom", 1995 - Résine polyester, métal et lumière, 198x217x87 cm
© ADAGP, Paris 1997

 

    Ces espaces sont finalement des lieux de méditation, habités par les mots et l'écho que notre esprit leur prête. Même dans les pièces monumentales sensées être pénétrables - tel Cloudy Box: Saché (1996) dont les portes intérieures permettent une circulation interne mais dont l'accès demeure impossible, mais également comme Bedroom ou Living Room (1995), physiquement impraticables - les sculptures sont autant de lieux proposés par l'artiste pour s'isoler mentalement.

    Toute l'oeuvre de Jaume Plensa est une " invitation au voyage ", un appel à l'expérience poétique et à l'exploration d'espaces sensibles et littéraires.

     

      Catalogue: Textes de Daniel Abadie, John Berger, Hans-Jurgen Buderer, Jaume Plensa et un entretien avec Manuel Borja-Villel. 136 pages, environ 250 FF

     

    Relations presse: Eva Bechmann, assistée de Maya Salem

     

     

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