Georges Rousse

Georges Rousse, entre fiction et espace

 

Toute l'oeuvre de Georges Rousse pourrait se résumer en trois mots éloge du paradoxe. Picturale, elle doit d'exister grâce à la photographie; photographique, elle doit tout à la peinture. Ensuite, ce qu'elle montre n'est pas la réalité de ce qu'a fait l'artiste in situ mais un point de vue particulier qui en donne une image spécifique, reconstituée visuellement à partir de l'angle sous lequel son appareil photo en a fixé la trace. Enfin les lieux où l'artiste opère étant voués à la démolition ou au réaménagement, il ne reste aucun témoignage durable de son intervention. (...)

Comme il en est dans la peinture et dans la photographie, la lumière et l'espace constituent chez Georges Rousse les termes fondateurs d'une esthétique inédite et complexe qui joue de procédures visuelles mettant en question le regard. Sinon le regard lui-même, les attendus de ses habitudes perceptives, leurs déductions logiques et la normalité de leurs constats. Tout y est en effet convoqué pour surprendre le regardeur, voire le déstabiliser, comme s'il n'était d'autre manière que subversive et qu'il ne fallait en aucun cas le laisser indemne. Entre une irrésistible attraction et l'agacement qu'on a d'en comprendre le mode de composition, les images de Georges Rousse s'offrent à voir comme une véritable énigme, constituées qu'elles sont de la collusion de situations vécues ou d'événements imaginaires. D'un côté, il y a la transformation de ceux-ci, le temps d'une pose, en un espace virtuel offert au rêve et à la réflexion. Tout à la fois confortables et étranges, rassurantes et inquiétantes, les oeuvres de Rousse contribuent somme toute tant à régénérer notre regard en le dessillant qu'à nous inviter à repenser notre appréhension de l'espace en nous proposant une nouvelle expérience, celle d'une traversée imprévisible et lumineuse.

En fait de peinture et de photographie, l'art de Georges Rousse est d'abord et avant tout requis par la sculpture et par l'architecture. Je veux dire par la troisième dimension; C'est là un autre de ses paradoxes - et non des moindres. Ce rapport de construit est en effet le premier qu'il entretient dans la recherche de ces lieux en instance de toute disparition ou de transformation dans lesquels il intervient. Leur charge mémorable, leur présence délabrée, l'incertitude de leur devenir sont autant de critères qui participent alors à leur élection. (...)