Sommaire "Catalogue Baumaux"



Que Faire ?




De nos discussions il me revient ce matin l'interrogation que nous avions formulée:
"Que faire... Che fare ?". J'avais spontanément pensé à Mario Merz, et tu m'as rappelé
Lénine. C'est probablement entre deux figures de cette nature que je navigue. D'une
part subsiste cette question que la modernité, au fil des crises et des horreurs, n' a pas
su résoudre, d' autre part s' étend le vide engendré par la disparition des avant-gardes.
A cette situation des réponses sont apportées: il y a celle de l'innocence et de la spontanéité-
té d'où surgit la Figuration Libre, ou bien celle de l'affrontement aux aînés qui énonce le
Simulacre, ou bien encore le retour à la tradition picturale qui remet en cause l'héritage de
Duchamp et du Formalisme. Mais dans aucune je ne me reconnais vraiment. Bien que la
peinture soit à l'origine de ma réflexion, je reste par exemple, perplexe sur son aptitude à
engendrer de nouvelles formes lorsqu'elle se limite aux matériaux de la tradition. En matière
de peintres contemporains je fais plutôt référence à des artistes comme Bertrand Lavier, ou
Christian Boltanski qui définissent une conception de la peinture à laquelle j'adhère plus
volontiers. . .
Dans ce contexte j'ai cherché une solution qui me permettrait de garder contact
avec la peinture et le musée, sans faire abstraction des acquis de la modernité et en particu-
lier de sa capacité à intégrer de nouveaux matériaux. Un premier projet est ainsi apparu.
Il consistait à produire une série de peintures sur des panneaux publicitaires au format
standard de 135 x 175. J'avais choisi ce support parce qu'il était en soi l'image d'un tableau:
une surface plane cernée d'un cadre de bonne proportion. Seule cette image m'intéressait.
Cela signifiait qu'il fallait respecter la surface, ce qui m'a conduit à convoquer le mono-
chrome. A terme je me retrouvais gérant d'une collection de tableaux de formats identiques,
variables en couleur et en titre. Le titre prenait alors une place déterminante en devenant un
moyen mnémotechnique pour organiser cette collection en fonction de la couleur et des
connexions subjectives qu'elle établissait avec le langage. Sa place était si importante que
je l'inscrivais de manière ostentatoire sur la partie inférieure du cadre. Cette technique d'éti-
quetage est quotidiennement utilisée avec les outils informatiques pour organiser la masse
abstraite des fichiers et des dossiers accumulés sur le bureau virtuel.
Je retenais de cette expérience la manière dont une figure de la modernité, en l'oc-
currence le monochrome, surgissait dans une forme de représentation: le tableau. C'était
comme une épave qui flottait à la surface des souvenirs, une sorte de figure mythologique.
En réalité, la clé de cette expérience se cachait dans ce qui n'était pas vraiment une citation,
mais plutôt la réapparition d'une forme historique. Un fantôme, un revenant en quelque
sorte, dont la substance se serait évaporée. Je retiens comme mémoire générique de cette
période une uvre qui fût montrée au Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris dans l'expo-
sition Ateliers 88: un monochrome blanc, ou un achrome pour être plus juste, portant sur le
cadre le titre White Spirit: l'Esprit Blanc. Dans cette idée il y avait de l'énergie en "stand by". . .


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